Des deux côtés du Léguer noir
Les rangs de peupliers minces
Jettent au ciel leurs mâts droits.
De-ci de-là un frêne :
Tulle vert qui tremble dans les souffles.
La surface tranquille de l’eau : miroir clair
Qui renvoie l’image :
Moutons d’un blanc exquis dans le ciel bleu
Et arc-de-triomphe des grands arbres.
Face à face de l’abîme et de l’espace.
Une feuille rousse tombe de l’espace.
Une feuille rousse sort de l’abîme.
À la même vitesse : lentes, de biais
Toutes deux de même taille, même couleur
L’une descend doucement de biais
L’autre monte doucement de biais
À la surface tranquille de l’eau elles se baisent
Il ne reste plus qu’une feuille
Qui s’obstine, paisible, à s’en aller
au fil de son destin.
Automne 1963
(Traduction Paol Keineg)